Texte de Daniel Fahri

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Le professeur Henri Nahum, 91 ans, est mort le 20 décembre dernier. Il était né le 19 juillet 1928 à Smyrne de Méir Nahum et Ketty Pontremoli, tous deux originaires de Turquie. Sa sœur Edith, de deux ans sa cadette, est également née à Smyrne. Les parents d’Henri et Edith étaient instituteurs dans les écoles de l’Alliance Israélite Universelle, d’abord au Maroc puis à Smyrne. Ils ont transmis à leurs enfants des traditions juives et la langue judéo-espagnole qui a bercé leur enfance car leurs grands-parents qui vivaient chez eux ne parlaient pas d’autre langue. Mais ils leur ont également transmis une admiration et un amour immenses pour la France dont ils chérissaient la culture et la langue dans laquelle, comme dans toutes les autres écoles de l’AIU à travers le monde, ils enseignaient. Lorsque le jeune Henri eut à choisir des études, il aurait voulu opter pour l’histoire ou les lettres, mais son père l’en dissuada en lui faisant valoir que dans une carrière d’enseignant, en tant que juif, il serait toujours à la merci du bon vouloir d’un gouvernement, tandis que dans la médecine, par exemple, il serait autonome. En enfant respectueux des conseils paternels, Henri Nahum s’engagea dans des études médicales. Il fut nommé à l’hôpital Beaujon où il fit toute sa carrière et devint professeur de radiologie. A sa mort, et le jour de ses obsèques, toute l’Assistance Publique des Hôpitaux de Paris lui a rendu un hommage exceptionnel. – Henri aurait pu s’en tenir à ce parcours prestigieux, à son rôle de père puis de grand-père, mais sa passion première pour l’histoire le rattrapa à sa retraite ! Il retourna sur les bancs de l’université. Il a dit, dans une interview accordée à l’excellente revue Kaminando i avlando de l’association Aki Estamos (n° 32 ; septembre-décembre 2019) : « C’est à ce moment-là que le monde judéo-espagnol s’est vraiment révélé à moi. Au terme de ce parcours, j’ai choisi de faire ma thèse de doctorat sur l’histoire des Juifs de Smyrne. De ce travail, j’ai tiré un livre [« Juifs de Smyrne. XIX-XXème siècle. Aubier. Histoires, 1988] ». Depuis lors, le professeur de médecine devenu docteur en histoire n’a pas cessé d’écrire et d’enseigner dans différents cadres, notamment l’université d’été judéo-espagnole, de donner des conférences, d’écrire des articles. On lui doit également la parution sous sa direction de : Mis memorias : una vida yena de drama i perikolos. Un commissaire de police ottoman d’origine juive à Izmir au début du XXe siècle. Les mémoires de Rafael Cicurel. Istanbul : Isis, 2002 ; La Grande Guerre et la Guerre gréco-turque par les instituteurs de l’Alliance israélite universelle d’Izmir. Istanbul :  Isis, 2003 (Les cahiers du Bosphore).
Un seul homme, deux vies, tel fut le parcours d’Henri Nahum dont je suis fier d’être le parent puisqu’il était le fils de la cousine germaine de mon père, Ketty Nahum née Pontremoli, décédée à l’âge de 101 ans, et qui avait été l’institutrice de Maman à Smyrne. Henri était un homme discret, à l’esprit curieux et féru de généalogie. Il était le père de deux garçons et le grand-père heureux de quatre petits-enfants qui l’appelaient « papou », le terme grec pour désigner les grands-pères. Sa seconde épouse, Marie-Odile, lui a apporté un immense amour et l’a toujours soutenu, notamment dans ses dernières années de maladie.

Nous tenons à honorer nos chers disparus et à présenter à leurs familles nos sympathies les plus sincères dans l’épreuve qu’ils traversent.