Djudezmo, espanyol, espanyoliko, espanyolit ou ladino, quelle était la langue parlée par les Judéo-Espagnols déportés de France ?
Une nouvelle mode depuis quelques années consiste à appeler la langue des Judéo-Espagnols le ladino. Dans le langage courant ce terme est de plus en plus employé. Mais le langage courant se permet de fortes approximations : ainsi parle t-on d’un chauffeur pour un conducteur de voiture alors que ceci fait référence à l’homme qui alimentait en charbon les locomotives à vapeur. Ainsi dit-on un bifteck de cheval, ce qui voudrait dire littéralement : une tranche de bœuf de cheval. Le langage courant ne s’encombre pas de précisions scientifiques.
Qu’en est-il scientifiquement ? Le professeur Haïm Vidal Sephiha a fait sa thèse sur le ladino et l’a défini comme étant une langue calque. Qu’est-ce à dire ? Une langue calque consiste à mettre des mots d’une langue sur la syntaxe d’une autre. Ainsi, par exemple, le premier verset de la Bible, berechit, donnerait dans un judéo-français calque : En commencement, créa, le Dieu, à les cieux et à la terre. Tout le monde conviendra que ce n’est pas du français parlé. Il en est de même pour le ladino, ce n’est pas une langue qui se parle.
En quoi cette distinction est-elle importante ? Albert Camus disait : « Mal nommer un objet c’est ajouter au malheur de ce monde, car le mensonge est justement la grande misère humaine, c’est pourquoi la grande tâche humaine correspondante sera de ne pas servir le mensonge. » Nous vivons une période de confusionnisme galopant qui mène à la perte de repères dont nous connaissons malheureusement l’issue.
Vous trouverez en téléchargement un texte du professeur Haïm Vidal Sephiha : « Archaïsmes lexicaux en ladino », texte qui explicite clairement la différence entre djudezmo et ladino. Notons que Joseph Nehama dans son dictionnaire du judéo-espagnol fait lui aussi la distinction entre judéo-espagnol parlé et ladino.