En commémoration de la déportation des Judéo-Espagnols de France l’association Muestros Dezaparesidos a organisé deux journées exceptionnelles rassemblant des Judéo-Espagnols venus des quatre coins du monde. La date avait été choisie symboliquement car elle correspondait à la grande rafle des Judéo-Espagnols de nationalité grecque, pour la plupart Saloniciens, qui seront déportés par les convois 44 et 45 des 11 et 9 novembre 1942.
Le samedi 5, à la synagogue Don Isaac Abravanel a eu lieu un shabbath ladino en présence de Madame Elena Colitto Castelli petite fille du Consul d’Espagne en Grèce, Sebastian de Romero Radigales qui sauva des centaines de Juifs et de Monsieur Guillermo Rolland fils du Consul d’Espagne en France, Bernardo Rolland y Miota qui sauva également des centaines de Juifs, au point que la gestapo le désignait comme « l’ami des Juifs ». Un vibrant hommage leur fut rendu par Serge Benhaïm président de la communauté Don Isaac Abravanel après que des chants en ladino eurent fait vibrer une assistance de plus de 450 personnes.
Etait également présent Monsieur Metin Delevi, représentant du grand rabbin d’Istanbul dans la mesure où de nombreux déportés étaient originaires de Turquie. Il a ainsi été rappelé que le triangle formé par les rues Sedaine, Popincourt et La Roquette était, avant guerre, appelé la petite Turquie et que les Juifs venus de l’ex Empire ottoman étaient appelés « los Turkinos ». Des milliers de Judéo-Espagnols y vivaient et travaillaient parlant aussi bien le français que le judéo-espagnol, ils se retrouvaient dans des restaurants comme le Bosphore ou Sotil où la cuisine orientale leur rappelait leur pays d’origine.
Le dimanche 6 au matin eurent lieu deux conférences :
L’une d’Erika Perahia Zemmour, Responsable du Musée Juif de Thessalonique : » Le caractère unique du Musée Juif de Thessalonique «
L’autre d’ Aliki Arouh, Responsable des archives de la Communauté Juive de Thessalonique : « Les richesses des archives, notamment généalogiques, disponibles «
Ces conférences se déroulèrent devant 150 personnes dont Monsieur Iannis Boutaris maire de Salonique et furent animées par Michel Azaria vice-président de l’association JEAA. Après avoir rappelé le drame que connu la communauté de Salonique, l’une des plus importante des Balkans, qui fut détruite à 98 %.
Le dimanche après-midi nous nous sommes retrouvés dans la salle Olympe de Gouges située dans le 11° arrondissement de Paris. Tout comme la date, le lieu est très symbolique. En effet le 11° arrondissement a particulièrement été touché par la barbarie nazie : à lui tout seul il compte un quart de tous les déportés judéo-espagnols de France. C’est aussi dans le 11° arrondissement qu’eut lieu la première rafle, la police française aidée par les militaires allemands boucla le quartier et arrêta des centaines de personnes. C’est pourquoi il était normal que le maire du 11° arrondissement, monsieur Vauglin, fasse le discours d’ouverture. Il fut suivi de nombreuse personnalités ; Serge Klarsfeld président de l’association des Fils et Filles des Déportés Juifs de France (FFDJF), Iannis Boutaris maire de Salonique, David Saltiel président de la communauté juive de Salonique, Metin Delevi conseiller du grand rabbin d’Istanbul et Haïm Vidal Sephiha président d’honneur de l’association Muestros Dezapresidos, ancien déporté d’Auschwitz.
Dans la salle, nous avons pu compter sur le soutien de nombreuses personnalités : l’Ambassadrice de Grèce, les représentants des Ambassades, de Turquie, d’Espagne, d’Israël. Ainsi que le député du 11° arrondissement Patrick Bloche, le grand Rabbin de France Haïm Korsia, le président du Consistoire Joël Mergui, le président du Crif Francis Kalifat et les représentants des grandes institutions juives.
Aussi c’est devant 700 personnes que se déroula une conférence de présentation du livre par Xavier Rothéa et Corry Guttstadt, historiens, sous la présidence d’Annette Wieviorka. Ensuite l’ensemble los Pasharos sefaradis chantèrent les « cantigas » traditionnelles judéo-espagnoles rappelant aux plus anciens leurs souvenirs d’enfance et faisant découvrir aux plus jeunes les traditions familiales. D’autant que le tout a été couronné par la distribution des fameuses « borekas » symbole de la cuisine judéo-espagnole.
Il y avait également ce jour une exposition composée de 17 kakémonos racontant l’histoire de la déportation des judéo-espagnols à partir de l’histoire des déportés et une pièce où l’ensemble des associations avaient leur stand pour présenter leurs activités.
Le moment le plus émouvant a été quand des membres de familles qui s’étaient perdus de vue se retrouvèrent ainsi que des amis qui ne s’étaient pas vus depuis longtemps et échangèrent des nouvelles. Il en était de même pour ceux qui découvrirent sur les panneaux de l’exposition l’histoire de leur famille qu’ils ignoraient en grande partie.